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Photo du rédacteurIgor Robinet-Slansky

9 JANVIER 1873 : MORT DE NAPOLÉON III

Ce 9 janvier, on célébrait les 149 ans de la mort de l’ex-empereur des Français, Napoléon III, le 9 janvier 1873 en Angleterre. 1er président de la 2e République (1848-52), instaurateur du Second Empire (1852-70), il sera au pouvoir 22 ans, dont plus de 18 ans comme empereur. Mais qui était-il et comment a-t-il marqué l’Histoire de France?


Revenons en arrière. La Révolution de 1789, mais surtout la déchéance de Louis XVI en 1792, marquent la fin de longs siècles de monarchie en France, et le début de la 1ère République. Une courte République puisqu’à partir du 19e siècle vont se succéder empereurs et monarques, jusqu’à la 3e République en 1870.


Ainsi, en mai 1804, après le Directoire, un coup d’état et le Consulat, le Premier Empire de Napoléon 1er est proclamé. C’est sous ce régime impérial que naît Charles Louis Napoléon Bonaparte, le 20 avril 1808 à Paris. Neveu de Napoléon 1er, il est le fils du frère de l’Empereur, Louis Bonaparte, et d’Hortense, la fille que l’Impératrice Joséphine a eu de son 1er mariage avec Alexandre de Beauharnais. Son père, nommé roi de Hollande, est souvent absent et il est élevé par sa mère avec ses 2 frères.

A la chute de l’Empire en 1815, la famille Bonaparte quitte la France. La reine Hortense s’installe en Suisse avec ses fils de 1817 à 1826, au château d’Arenenberg, avant de s’établir à Rome. Là, Louis-Napoléon se passionne pour la politique et s’engage déjà pour l’unité de l’Italie encore morcelée en royaumes, dont certains dépendent de l’Autriche.


En France, après la chute du 1er Empire, la Restauration voit le retour successifs des deux frères de Louis XVI sur le trône (Louis XVIII: 1814/15-1824 et Charles X: 1824-1830). Mais après trois jours d’insurrection populaire (les Trois Glorieuses: 27-28-29 juillet 1830), Charles X, roi autoritaire, abdique, et son cousin, Louis-Philippe d’Orléans, accède au pouvoir comme Roi des Français, soutenu par les libéraux. Cette Monarchie dite de Juillet repose sur une charte constitutionnelle, un compromis entre le roi qui n’a plus de pouvoir absolus et la nation. Le drapeau bleu, blanc, rouge est rétabli, la censure est abolie, la religion catholique n’est plus religion d’état.


Elevé dans le souvenir de l’Empire et dans l’idée qu’il est issu d’une grande dynastie, Louis-Napoléon devient l’héritier politique de Napoléon 1er dont l’Aiglon, son fils, est mort en juillet 1832. Un héritage confirmé quand son père Louis et son oncle Joseph, frères de l’ancien empereur, lui cèdent cette place. Fort du soutien des partisans bonapartistes, Louis-Napoléon va tenter de prendre le pouvoir le 30 octobre 1836 à Strasbourg. Il échoue et Louis-Philippe le fait emprisonner. Libéré, il est condamné à l’exil aux Etats-Unis mais il revient en Suisse en août 1837 et, après la mort de sa mère le 5 octobre, il s’installe en Angleterre.


En France, les opposants, notamment républicains, déstabilisent le régime du monarque bourgeois qu’est Louis-Philippe. Dans cette France qui s’industrialise, la jeune classe ouvrière dont les conditions sont précaires, stimulée par les nouvelles théories socialistes et par les groupes républicains, s’insurgent régulièrement dans les grandes villes (Paris, Lyon).


L’ordre est rétabli par la force, la censure aussi, et les associations républicaines sont dissoutes. Par ailleurs, malgré son développement économique, la France entre en récession en 1846. Le chômage augmente et la colère monte chez les ouvriers, mais aussi chez les bourgeois libéraux, nostalgiques de la Révolution française ou de l’Empire.


En parallèle, resurgit le nom de Louis-Napoléon Bonaparte en France, et lorsqu’en mars 1840, Louis-Philippe décide de rapatrier les cendres de Napoléon de Sainte-Hélène à Paris (elles entreront aux Invalides le 15 décembre 1840), Louis-Napoléon souhaite surfer sur la vague bonapartiste pour prendre le pouvoir par la force. Il débarque à Boulogne-sur-Mer dans la nuit du 5 au 6 août mais il se fait arrêter et emprisonner au fort de Ham dont il s’évade le 25 mai 1846, profitant de travaux dans sa cellule pour s’enfuir, déguisé en ouvrier. Réfugié en Angleterre, il organise son retour en France.


A Paris, pour contourner l’interdiction de leur association, les républicains organisent des réunions sous forme de banquets festifs (non interdits) pour pouvoir se rassembler. Mais le 22 février 1848, un banquet est interdit. Etudiants et ouvriers manifestent, rejoints par certains bourgeois et la Garde Nationale. Face à la grogne populaire et pour calmer les esprits, Louis-Philippe renvoie son Premier Ministre François Guizot, jugé trop autoritaire, et rappelle l’homme qui l’avait mené sur le trône, Adolphe Thiers. Mais le lendemain, une manifestation dégénère, un tir retenti, l’armée mobilisée réagit et 20 personnes sont tuées. La révolte s’amplifie et les barricades se multiplient.


Le 24 février, la foule envahit les Tuileries et Louis-Philippe est contraint d’abdiquer en faveur de son petit-fils le Comte de Paris, mais en vain. L’Assemblée nationale est envahie et le 25, à l’Hôtel de Ville, un groupe de républicains mené, entre autres, par Raspail, Ledru-Rollin, Lamartine, Arago, Dupont de l’Eure, Louis Blanc et Pierre Marie de Saint-Georges, proclame la IIe République. Louis-Philippe s’exile en Angleterre et un gouvernement provisoire est composé. En Europe, un vent révolutionnaire inspiré par la France, un «printemps des peuples», mène de nombreux monarques à concéder à des constitutions plus libérales.


Le nouveau gouvernement républicain provisoire proclame le suffrage universel direct (uniquement masculin), désireux de faire du vote le seul mode de contestation et de renversement des gouvernements à la place des mouvements insurrectionnels. Il abolit aussi l’esclavage et crée les ateliers nationaux financés par l’Etat afin de donner du travail aux chômeurs (travaux de voieries etc.). Promulguée le 4 novembre 1848, la nouvelle constitution rétablit le principe de Liberté, Egalité, Fraternité. Le pouvoir législatif est confié à une chambre de députés élus au suffrage universel, et le pouvoir exécutif à un Président de la République puissant, en charge des ministres et des armées. Le problème? aucun moyen n’existe pour trancher en cas de désaccord entre les deux pouvoirs: aucune 3ème force.


Avant cela, le 21 juin 1848, les députés nouvellement élus en avril pour travailler sur la future constitution, des républicains libéraux issus en partie d’anciens courants orléanistes (partisans de Louis-Philippe d’Orléans) et conservateurs, votent la suppression des ateliers nationaux qu’ils jugent onéreux et inefficaces. Une insurrection populaire et socialiste s’élève alors: 4 jours réprimés dans le sang. Le peuple se sent ainsi trahi par la nouvelle république.



Louis-Napoléon, qui s’était fait élire député en avril puis en juin 1848, décide de se présenter à l’élection présidentielle qui a lieu le 10 décembre 1848. Les candidats républicains sont vite discrédités par leur gestion répressive des émeutes de juin. Soutenu par le Parti de l’Ordre qui regroupe des monarchistes (légitimistes et orléanistes), des bonapartistes ou encore des libéraux et conservateurs, dont Adolphe Thiers (orléaniste) et Victor Hugo (monarchiste devenu républicain), Louis-Napoléon Bonaparte se pose en défenseur du suffrage universel et du peuple contre l’autorité de l’Assemblée Nationale à majorité républicaine. Il est élu à 75% le 20 décembre et devient le 1er Président de la République Française, mais aussi le plus jeune (40 ans) jusqu’à Emmanuel Macron en 2017.


Les élections législatives de mai 1849 consacrent le Parti de l’Ordre qui se veut garant de l’ordre, de la religion et des bonnes mœurs. L’Assemblée Nationale vote alors des lois conservatrices et réactionnaires: retour de la religion catholique au cœur de l’éducation, restriction de la liberté de la presse, limite du suffrage universel, répression des oppositions… De leur côté, les républicains sont trop peu nombreux pour jouer leur rôle de parti d’opposition.


Louis-Napoléon Bonaparte, qu’on appelle le Prince-Président en référence à sa lignée impériale, profite de l’hétérogénéité du Parti de l’Ordre, de l’impopularité des mesures votées dans la confusion par l’Assemblée, et de la faiblesse des républicains. En tournée en France en 1850, il critique la politique des députés et se pose à la fois en défenseur des ouvriers et du peuple, comme en protecteur de la religion et de la propriété. Son image à la fois sociale, libérale et conservatrice renforce sa popularité, appuyée par des sociétés bonapartistes et des journaux acquis à sa cause. En outre, il réussit en parallèle à gagner la confiance de l’armée.


Tout serait donc parfait pour lui si la constitution n’empêchait la réélection du président pour un second mandat. Louis-Napoléon tente alors de réviser la Constitution avec le soutien d’un Comité pour la Réélection à l’initiative de pétitions qui trouvent un écho auprès de la population. Cependant, l’Assemblée rejette le texte et le Prince-Président n’a plus le choix: s’il veut garder le pouvoir, ce sera via un coup d’état. Il nomme alors des proches aux commandes de l’armée et de la Garde Nationale, et à coups d’une propagande organisée par la société du Dix Décembre créée par ses soutiens, il dévalorise le socialisme et discrédite l’assemblée et ses députés à l’image réactionnaire.


Au matin du 2 décembre 1851, date anniversaire de la victoire de son oncle Napoléon 1er à Austerlitz (2 déc. 1805) et de son sacre (2 déc. 1804), Louis-Napoléon lance un appel au peuple et à l’armée via une campagne d’affichage dans toute la France. Il annonce dissoudre l’Assemblée et rétablir le suffrage universel, et propose un plébiscite pour reconnaître son autorité. Le Palais Bourbon est occupé et les députés opposants arrêtés (dont Thiers). Des républicains (dont Victor Hugo et Jules Favre) tentent de soulever les Parisiens le 3 décembre. L’armée réprime la révolte. En Province aussi les insurgés sont réprimés et les républicains anéantis (27 000 sont arrêtés). Mais la majorité des ouvriers ne réagit pas. Louis-Napoléon a gagné la confiance du peuple et lors du plébiscite des 20 et 21 décembre, il est maintenu à la présidence avec 7,5 millions de «Oui». Il gagne le pouvoir constituant et propose ainsi une nouvelle Constitution le 14 janvier 1852. Celle-ci partage le pouvoir législatif entre 3 assemblées: le Conseil d’Etat, nommé par le président, et qui prépare les lois qu’il propose; le Sénat, nommé par le chef de l’Etat pour contrôler la constitutionnalité des lois; et un Corps législatif (les députés) élu pour 6 ans au suffrage universel qui ne se prononce sur les lois que si elles sont validées par le Sénat… lui-même nommé par le président. L’exécutif est donc renforcé, le législatif affaibli. Le président est élu pour 10 ans.


Finalement, contrôlant ainsi le Corps législatif, puis la presse via une loi en 1852, Louis-Napoléon Bonaparte décide de proposer au Sénat de rétablir l’empire. Ce dernier approuve. Un plébiscite est organisé les 21 et 22 novembre 1852: 8 millions de votant diront «oui», et le 2 décembre 1852, le Second Empire est proclamé. Louis-Napoléon Bonaparte devient Napoléon III.

L’Empereur épousera son impératrice, l’Andalouse Eugénie de Montijo (5 mai 1826-11 juillet 1920), comtesse de Teba, le 30 janvier 1853. Ils auront un fils, le prince impérial Eugène Louis Napoléon, dit Louis-Napoléon, né le 16 mars 1856. Un régime politique fastueux et autoritaire, surtout dans sa 1ère partie (1852-1860), qui deviendra plus libéral dans sa deuxième moitié, et qui marquera le développement économique et culturel de la France, comme son entrée dans la modernité: innovations techniques (aluminium, électricité, moteur thermique), urbaines (Haussmann, développement du train), scientifiques (Pasteur, Claude Bernard), économiques (industrie, système bancaire, libre-échange, grands magasins, les halles), scolaires (école maternelle, enseignement primaire gratuit), et même sociales (maisons ouvrières, retraites, accidents du travail, soupes populaires, visites médicales gratuites, microcrédits). La «fête impériale» fait rayonner la France à l’international: réceptions fastueuses, mode, culture (Beaudelaire, Flaubert, Stendhal, Mérimée, Courbet, Manet, Offenbach, Auber), expositions universelles.


Politiquement, Napoléon III veut redonner sa grandeur et sa puissance à la France dans le monde. Il s’allie à la Grande-Bretagne, ennemi séculaire de la France, avec laquelle il remporte la guerre de Crimée aux côtés de l’Empire Ottoman contre l’Empire de Russie, de 1853 à 1856


Napoléon III s’engage aussi dans l’unification de l’Italie. La France prend tout d’abord part à la première guerre d’indépendance italienne (1848-49). Elle envoie des troupes pour rétablir le Pape, chassé des Etats Pontificaux par les républicains menés par Garibaldi. Cette 1ère guerre d’indépendance échoue. Napoléon III, aidé de l’Angleterre, va alors soutenir Camillo Benso, comte de Cavour (1810-61), un libéral élu président du conseil du royaume de Piémont-Sardaigne en 1852, afin de construire une Italie libre et unifiée. Après plusieurs provocations envers l’Autriche, l’empereur François-Joseph menace le Royaume de Piémont-Sardaigne. Napoléon III entre en guerre contre l’Empire d’Autriche pour protéger son allié. Une 2e guerre d’indépendance italienne éclate alors de 1859 à 1860. Les victoires françaises et piémontaises entraînent d’autres régions qui, après plusieurs événements, s’unissent en un Royaume d’Italie à la tête duquel Victor-Emmanuel II est nommé Roi d’Italie le 17 mars 1861. Afin d’éviter une présence italienne trop proche de la France, Napoléon III demande l’annexion du comté de Nice et du duché de Savoie. C’est chose faite en juin 1860.


Cependant, l’unification italienne n’est pas totale et des insurrections restent fortes, notamment dans les régions du sud. Finalement, une 3e guerre d’indépendance éclate en 1866 lorsque le royaume de Prusse veut récupérer les états allemands de l’Empire d’Autriche. Le Royaume d’Italie voit ici l’opportunité de récupérer la Vénétie, toujours aux mains des Autrichiens, et décide de s’allier à la Prusse. L’Italie envahit la Vénétie et attaque l’Autriche par le Tyrol, mais quand la Prusse signe un armistice avec François-Joseph, l’Italie ne peut continuer la bataille. L’Autriche qui est contrainte de céder la Vénétie à la Prusse victorieuse tente une manœuvre en la cédant d’abord à la France. François-Joseph imagine alors pouvoir s’allier les faveurs de la France. Mais Napoléon III signe un accord avec Victor-Emmanuel II: la Vénétie revient à l’Italie. L’unification totale de l’Italie est achevée avec l’annexion de Rome le 20 septembre 1870.


Au-delà de l’Italie, Napoléon III s’est aussi immiscé, outre Atlantique, dans la politique du Mexique. Appuyé par des conservateurs mexicains qui veulent installer dans leur pays un souverain européen, catholique et conservateur, afin de contrebalancer le pouvoir des Etats-Unis, Napoléon III enverra une expédition sur place, entre 1861 et 1867, pour installer un régime favorable aux Français. Il met alors à la tête de l'Empire du Mexique l’archiduc d’Autriche Maximilien de Habsbourg. Mais une guérilla éclate et lorsque la guerre de Sécession se termine aux Etats-Unis en avril 1865, ces derniers se tournent vers le Mexique. Ils somment la France de se retirer. Enlisé dans la guérilla, Napoléon III accepte. Le pauvre Empereur Maximilien, refusant d’abdiquer, sera fusillé en juin 1867.


Voici quelques interventions françaises qui montrent la volonté de Napoléon III de suivre l’exemple de son oncle, grand stratège. Cependant, il sera moins victorieux. L’intervention de la France dans les guerres d’Italie provoqueront ainsi des tensions avec le Royaume de Prusse géré par Bismarck. Des tensions qui conduiront à la guerre franco-prussienne de 1870.


Bismarck cherche en effet à unir tous les états allemands qui ne composent pas encore un seul pays, l’Allemagne. Il trouve alors en la France un ennemi commun à tous ces états. Suite aux guerres italiennes et après une provocation diplomatique bien menée par Bismarck, la France déclare la guerre à la Prusse. Malheureusement, elle ne mesure pas la puissance de ces états Allemands. En France, le pouvoir politique se divise entre pacifiste et partisans de la guerre. Les défaites s’enchaînent pour la France jusqu’à celle de Sedan où Napoléon III qui est malade est capturé. La guerre est gagnée pour la Prusse, et donc pour l’Allemagne. Elle est perdue pour la France. L’Alsace-Lorraine aussi.


La Guerre Franco-Prussienne aura donc eu raison de l’Empire. A Paris, des républicains menés par Gambetta proclament la 3e République le 4 septembre 1870. Seule aux Tuileries, l’impératrice Eugénie fuit vers l’Angleterre chez son amie la Reine Victoria. Elle y vit en exile à Camden Place avec son fils, le Prince Impérial -qui meurt en Afrique du Sud sous l’uniforme anglais en 1879. Il sont rejoints par l’Empereur qui y meurt le 9 janvier 1873. Eugénie vit encore 47 ans et s’éteint à Madrid le 11 juillet 1920 à 94 ans. Leurs corps reposent en Angleterre à l’Abbaye Saint-Michel sur leur domaine de Farnborough.


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