top of page
Photo du rédacteurIgor Robinet-Slansky

ANECDOTE : JUSQU’OÙ IRA LA CRINOLINE?

Dernière mise à jour : 14 avr.


La Castiglione en crinoline
La Castiglione

Vous connaissez certainement la crinoline? Tout du moins l’avez-vous sûrement déjà remarquée dans certains tableaux ou autres films historiques? Cette structure développée dans l’univers de la mode au milieu du 19e siècle va se répandre sous le Second Empire (1852-1870), grâce notamment aux somptueuses toilettes de l’impératrice Eugénie, l’épouse de l’empereur Napoléon III. Elle permet de donner des volumes surdimensionnés aux robes et jupes des élégantes, comme on n’en avait encore jamais vu auparavant, ce qui suscitera parfois quelques critiques et moqueries de la part des contemporains.


Mais revenons à ses origines. Depuis des siècles déjà, la mode oblige les femmes à contraindre leur corps au prétexte de l’élégance, du corset qui déforme le corps aux lourds artifices qui doivent assurer aux vêtements le volume nécessaire aux tendances du moment.


Au 16e siècle, le vertugadin, sorte d’armature en forme de bourrelet d’abord, puis de plateau, permettait de faire bouffer les jupes autour des hanches.



Au 17e siècle, la taille remonte et le corps de jupe -sa partie haute ou corsage- est baleiné, et un plastron rigide descend jusque sur le bas de jupe -sa partie basse, donc-, ne facilitant pas les déplacements.


Au 18e siècle, sous les robes flottantes, le corps baleiné (ancêtre du corset) affine la taille et assure la droiture du corps, tandis que les paniers en cerceaux d’osier ou fanons de baleine, plats sur l’avant et l’arrière, élargissent les hanches, et doivent être soutenus en-dessous par une multitude de jupons. Tout cela pèse très lourd et empêche les femmes de faire de grands mouvements et de se déplacer aisément.



Au 19e siècle, après une mode plus informelle sous la Révolution (robes chemises) et la libération du corps des femmes sous le Première Empire sous l’influence de l’impératrice Joséphine, le retour au corset et aux épais volumes est de mise sous la Restauration (1814-30) et sous la Monarchie de Juillet (1830-48).



Et c’est dans ce contexte que la crinoline voit le jour en 1840. Ce jupon très raide grâce au crin et au lin qui le composent, et qui lui donnent son nom, peut supporter le poids de sept épaisseurs de jupons superposés. On peut ainsi créer un très gros volume sous la robe sans l’inconfortable panier. Mais la crinoline que nous avons en tête va apparaître quelques années plus tard, sous le Second Empire, alors que ce jupon va se réinventer et quasiment révolutionner la mode féminine. Au début des années 1850, on crée ainsi un jupon composé de fanons de baleine ou d’osier qui donne du volume sans nécessité l’ajout d’une multitude d’épaisseurs par-dessus, ce qui allège l’ensemble.



Mais ce qui va réellement améliorer le confort des femmes du 19e siècle, même si beaucoup de travail reste à faire notamment en ce qui concerne l’usage du corset, c’est l’invention d’un nouveau type de crinoline par le Français Auguste Person - ou était-ce le Français R.C. Milliet? la question n’est pas clairement résolue. Cette nouvelle crinoline, nommée aussi ‘jupe-cage’, est composée de cerceaux métalliques en acier cousus dans le tissu ou reliés entre eux par des bandelettes de tissus, ce qui la rend plus légère. Une légèreté renforcée par le fait qu’il n’est plus nécessaire de porter de nombreux jupons au-dessus pour donner du volume.


Les mouvements et les jambes de celles qui portent ces jupes-cages sont libérés, et les pas de danse plus faciles pour les longues soirées de bals que la fête impériale aime particulièrement. Enfin, cette crinoline est plus solide que les anciens paniers: l’acier plie et ne casse pas quand on s’assoit. Elle est également très facile à ranger.



Mais ce qui est le plus étonnant pour la mode de l’époque, c’est que cette forme de crinoline permet aussi de surdimensionner l’ampleur des robes, et les couturiers vont en abuser… jusqu’à la caricature! On verra ainsi des robes d’un diamètre pouvant aller jusqu’à deux mètres, une taille qui frise le ridicule pour certains observateurs. Ainsi, les caricaturistes, nombreux à l’époque, en feront un de leur sujet de prédilection et de leurs critiques piquantes : la crinoline ne gênera-t-elle pas la circulation? les portes seront-elles assez grandes? les élégantes ne risquent-elles pas de prendre feu en passant près d’une cheminée?



Quoi qu’il en soit, un réel problème est alors soulevé : les robes placées au-dessus des crinolines utilisent une très grande quantité de tissu, ce qui peut coûter cher, même aux plus riches. Aussi, on invente la robe à transformation qui se compose d’une jupe et d’un haut interchangeable taillé dans la même étoffe. On garde ainsi pour la journée la même jupe et la même crinoline, mais on change le haut, jusqu’à cinq fois par jour, pour s’adapter aux différentes activités quotidiennes: corsage fermé pour la journée, décolleté le soir, ou échancré et dénudant les épaules pour les bals.



Tournure dite queue d'écrevisse vers 1875, faux-cul , crinolinette - Palais Galliera
Tournures

Cependant, comme la mode évolue et se renouvelle vite, la crinoline change de forme dans les années 1860 et s’aplatie sur le devant, reportant tout son volume sur l’arrière des robes. Cette crinoline elliptique va peu à peu perde du volume. On voit apparaître des crinolinettes, plus petites et composées de demi-cerceaux, qui deviennent rapidement des faux-culs, des poufs ou des ‘queues d’écrevisse’, appelés des ‘tournures’. Créées par le premier grand couturier parisien, l’Anglais Charles Frederick Worth, en 1867, la tournure jette le volume sur l’arrière de la robe pour valoriser la chute de reins, tandis que le devant est plat et près du corps.


La mode de la crinoline ultra volumineuse n’aura finalement duré qu’une quinzaine d’années, mais elle aura marqué les esprits, jusqu’à aujourd’hui.

Pour en savoir plus, rendez-vous au Palais Galliera jusqu’au 26 juin pour l’exposition Une Histoire de la Mode, mais aussi au Musée de l’Impératrice (Eugénie) dans le superbe Palais de Compiègne. Et pour aller plus loin, je vous invite également à découvrir sur ce blog l’article et le podcast dédiés à ma visite du Palais de Compiègne, et l’article relatant ma visite de l’exposition ‘Une Histoire de la Mode’ au musée Galliera.


Sources

Comentarios


bottom of page