Chaque année, le 1er avril est le lot de blagues plus ou moins réussies, et de nombreux poissons en papier sont collés dans le dos des parents par des enfants qui lancent, en riant, un malicieux: «poisson d’avril!». Pourtant, sait-on vraiment à quand remonte cette tradition et d’où elle vient? Comme souvent, plusieurs explications coexistent, pour le choix du jour, le 1er avril, comme pour celui des emblématiques poissons.
Tout d’abord, d’un point de vue historique, l’expression «poisson d’avril» apparaît pour la première fois en 1466 dans l’ouvrage de Pierre Michault «Doctrinal du temps présent». À l’époque, un poisson d’avril est défini comme «un entremetteur […], un jeune garçon chargé de porter les lettres d’amour de son maître». Rien n’à voir, donc, avec le poisson d’avril que nous connaissons! Il faut ainsi attendre le 17e siècle pour que ce terme désigne une tromperie, puis le 18e pour que naisse l’expression «donner un poisson d’avril», qui se traduit par le fait d’amener quelqu’un à agir de telle manière qu’on puisse se moquer de lui ensuite. Cependant, il ne s’agit ici que de l’apparition de cette locution, «poisson d’avril !», et non de l’explication du choix du 1er avril, ni de ses traditions en tant que telles.
Concernant le jour même du 1er avril, d’abord, l’explication la plus rependue date de 1564, sous le règne du roi Charles IX, fils de Catherine de Médicis et d’Henri II, qui règnera de 1560 à 1574. Le 9 août 1564, Charles IX décide ainsi de promulguer l’édit du Roussillon afin d’unifier le calendrier français. En effet, bien qu’à l’époque on suive le calendrier Julien, instauré en 46 av. J-C par Jules César et qui fixe le premier jour de l’année au 1er janvier, un décalage existe entre les régions du royaume et l’ensemble de la population ne fête pas la nouvelle année au même moment. On la célèbre alors encore souvent au début du Printemps, le 25 mars pour certains, ou le 1er avril pour d’autres. Pour éviter les confusions, Charles IX aurait décidé de faire officiellement débuter l’année au 1er janvier, même s’il n’existe apparemment aucun écrit pour le prouver concrètement.
Pour autant, malgré cette directive royale, les informations ne circulent pas aussi bien au 16e siècle qu’aujourd’hui, notamment au sein d’une population majoritairement analphabète. Aussi, certains, mal informés du changement, auraient continué à fêter le nouvel an le 1er avril, et à s’offrir des présents et des étrennes à cette date comme la tradition le voulait. Pour se moquer d’eux, on se serait mis à leur tendre des pièges, à leur jouer des tours et à leur offrir de faux cadeaux… Ce serait donc là, la source de ce jour consacré à la plaisanterie!
Une autre origine du 1er avril farceur remonterait plus loin, à la Grèce Antique. Dans le calendrier grec, de nombreux jours sont dédiés à une ou plusieurs divinités. Or on sait que dans les 12 jours qui suivent l’équinoxe du printemps, les Grecs célébraient Momos, le dieu du rire, bouffon de l’Olympe personnifiant la malice, la raillerie et la moquerie. Les Grecs agrémentaient cette journée de blagues, une tradition empruntée ensuite par la Rome antique. Or dans le calendrier Julien, le 1er avril arrive bien 12 jours après le printemps, et correspondrait donc au jour du rire.
Cette légende est également renforcée par la concomitance des fêtes latines des Hilaria. Le 25 mars, les Romains célébraient en effet l’équinoxe de printemps et le renouveau de la nature en honorant deux divinités: Cybèle, la déesse de la terre, appelée aussi la Magna Mater, soit la Grande mère ou la mère des Dieux, et Attis, son fils adoptif et amant, dieu de la végétation. Lors de ces fêtes, un carnaval était organisé, et les farces, les satires et les paroles débridées étaient de mise. Le 1er avril tel que nous le célébrons aujourd’hui émanerait peut-être ainsi du couplage de ces farces de la fin mars et de la fête du Dieu du rire organisée aux alentours du 1er avril.
Cela étant dit, à chacun et chacune de choisir la plus crédible de ces deux versions. En revanche, aucune d’elles n’explique l’origine de la tradition du poisson d’avril, et on relève alors ici aussi plusieurs hypothèses.
Selon une première explication, avril était le mois de la reprise de la pêche après l’hiver. Il était alors de tradition de s’offrir des poissons et d’en manger à ce moment-là pour la première fois de l’année.
Une deuxième hypothèse, proche de celle-ci, raconte qu’au Moyen-Âge, pour fêter l’ouverture de la saison de la pêche et permettre qu’elle soit fructueuse, on avait l’habitude de suspendre discrètement un poisson dans le dos des marins qui partaient en mer.
Une autre version, similaire mais plus sarcastique, dit plutôt qu’à cette époque de l’année, on épinglait un poisson au dos des pêcheurs pour se moquer d’eux quand ils revenaient bredouilles de leurs sorties en mer. Quoi qu’il en soit, s’il s’agissait au départ de vrais poissons, très vite ceux-ci se sont mués en poissons artificiels... jusqu’à aujourd’hui où ils sont bien souvent en papier.
Une troisième explication serait d’origine chrétienne. Avril est en effet le mois qui marque la fin du Carême, cette période de 40 jours de jeûne avant Pâques pendant laquelle les Chrétiens privilégient notamment le poisson à la viande. Le 1er avril serait donc l’un des derniers jours où l’on est contraint de manger du poisson, un «poisson d’avril» qui aurait donné l’expression que nous connaissons et qui aurait été associé à cette journée de malices.
Restons dans la tradition chrétienne avec une autre version religieuse. Persécutés par les Romains, les premiers chrétiens se reconnaissaient grâce à un signe en forme de poisson nommé Ictus. En grec, ictus ou ikhtús signifie «poisson», mais ses lettres sont aussi les initiales grecques de «Jésus Christ, Fils de Dieu, Sauveur». En cette fin de Carême, la tradition du poisson d’avril pourrait ainsi faire référence à ce poisson, symbole de ralliement chrétien.
Enfin, une dernière version donne l’astrologie comme point de départ de la tradition du poisson d’avril. En effet, il ferait simplement écho au signe du zodiaque du Poisson qui commence le 19 février et se termine le 20 mars, pour l’arrivée du printemps.
Quoi qu’il en soit du poisson comme de la date du 1er avril, à vous de choisir parmi ces différentes explications. Pour ma part, je me dis qu’il faut sûrement prendre un peu de chacune de ces histoires pour imaginer la véritable origine de ce jour le plus farfelu de l’année.
SOURCES
Le site J’aime mon Patrimoine
Le site du Figaro.
Le site de Ca m’intéresse
Le site Mythlogica
Le site Hérodote dans cet article et celui -ci.
Le site de Wikipédia
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