Savez-vous ce qu’on appelle une ‘turquerie’ au 18e siècle? Pour le savoir, suivez-moi au musée du Louvre à Paris, et plus précisément dans le département des Objets d’art. Officiellement créé sous Napoléon III (r.1852-70), on y trouve plus de 8500 œuvres (objets, meubles, décors, bijoux, orfèvrerie, émaux, bronzes, céramiques, verrerie, tapisseries…) datant du Moyen-Âge au Second Empire, et originaires d’Occident chrétien et d’Orient byzantin pour les plus anciennes, d’Europe pour la Renaissance et les 16e & 17e siècles, et de France pour les plus récentes (18e & 19e siècles). Mais aujourd’hui, parmi les espaces traitant du 18e siècle, c’est celui dédié aux turqueries, avec ses décors riches, colorés et excessifs, qui m’intéresse particulièrement.
Qu’est-ce qu’une turquerie? Il s’agit d’un objet ou d’une œuvre émanant du mouvement orientaliste qui s’est développé en décoration et en architecture d’intérieure entre les 16e et 18e siècles. En effet, aux frontières de l’Europe, l’Empire Ottoman dont la Turquie est le point central, apparaît comme le seul à pouvoir rivaliser avec les puissances européennes, culturellement et militairement. Et quand au 16e siècle s’ouvre une période de paix et de relations diplomatiques entre l’Orient et l’Occident, notamment en France ou une alliance franco-ottomane est signée en 1536, les voyages, comme les relations commerciales, vont s’accroître, et avec eux les échanges culturels. Les produits exotiques, comme le café, arrivent en Europe, et les grands du monde vont se passionner pour les beaux-arts, l’architecture et les décors orientaux. Une influence que l’on retrouve alors dans ce qu’on va appeler les ‘turqueries’: objets, arts (peinture, musique) ou décors inspirés par cette mode orientaliste (en musique, Lully et sa ‘Marche pour la cérémonie des Turcs’ ou Mozart avec sa ‘Marche turque’ en sont deux exemples). Un terme cependant réducteur puisqu’en réalité, la culture ottomane ne se limite pas à la Turquie.
En France, la deuxième moitié du 18e siècle, connaît un goût grandissant pour les turqueries. Les résidences, notamment royales, se parent de cabinet ‘turcs’ comme ceux du comte d’Artois, frère de Louis XVI, à Versailles (d’où proviennent les portes et panneaux exposés ici au Louvrte) ou dans son palais du Temple à Paris (dont on voit les sièges ici) ; ou celui de la reine Marie-Antoinette à Fontainebleau (dont on voit ici les deux chenets aux dromadaires).
Ces petites pièces intimes sont décorées, comme ici au Louvre, de personnages coiffés de turbans, de croissants musulmans, de dromadaires ; et meublées d’éléments sculptés à l’oriental, comme les pieds incurvés des fauteuils. Tout dans ces cabinets et objets évoque un orient fantasmé et réinterprété par les artistes et artisans de l’époque.
N’hésitez pas à visiter le Département des Œuvres d’art du Louvre. On y trouve des objets, meubles et décors surprenants, et on y apprend beaucoup. Et si vous passez par-là, arrêtez-vous quelques instants sur le cabinet truc reconstitué.
Sources
Cartels du Département des Objets d’art du Louvre
Le Guide du Louvre – Musée du Louvre Editions
La rubrique ‘Objets d’art’ du site Internet du musée du Louvre
Wikipédia, rubrique ‘Turqueries’
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