A quelques kilomètres de Narbonne, les ruines d’une tour -a priori celle d’une forteresse- s’élèvent dans les hauteurs du village de Gruissan. Cette tour, c’est la Tour dite de Barberousse ou de Broa.
Les environs de l’actuel village sont habités dès le Néanderthal (-100000 ans). Mais sous l’occupation romaine de la région narbonnaise, Gruissan n’est encore qu’un lieu de villégiature, colonisé à partir de 45 av. JC. par les vétérans de la Xe légion -son nom viendrait d’une habitation, la «villa Grussiana», appartenant à l’un d’entre eux.
Au Moyen-Âge, avec les risques grandissants d’attaques des pirates ou des Sarrazins depuis la mer et les étangs, la population s’éloigne du rivage. Sur un rocher dominant l’étendue d’eau, un premier château fort défensif est bâti au 11e siècle par le seigneur de Gruissan, en accord avec l’archevêque de Narbonne. Il s’agit de protéger en amont la ville et son port. En 1245, pour renforcer les défenses de la seigneurie, et donc celles du port de Narbonne, l’archevêque Guillaume de Broa érige une tour au cœur du château, ainsi que des fortifications autour du village qui s’est développé «en escargot» autour de la forteresse, sur les flancs de la colline rocheuse. C’est aussi à cette époque que l’on édifie l’église Notre-Dame de l’Assomption comme partie intégrante des fortifications. En 1296, l’archevêque Gilles Aycelin obtient que la seigneurie de Gruissan soit rattachée à l’archevêché narbonnais.
Au 16e siècle, pendant les Guerres de Religions qui voient s’opposer Catholiques et Protestants en France, le fort de Gruissan est le témoin de nombreux affrontements. En 1632, Louis XIII et son ministre Richelieu ordonnent la destruction de nombreux châteaux du Languedoc pour éviter qu’ils ne servent de place forte aux Protestants. Parmi eux, le château de Gruissan sera en partie démantelé pour reconstruire le village abîmé par les conflits. Depuis lors, la Tour de Broa, dite aussi Tour de Barberousse, trône au-dessus de Gruissan.
Mais pourquoi ce nom de Barberousse?
Il ne s’agit pas du célèbre pirate Khizir Khayr ad-Dîn, dit Barbe Rousse (1466-1546), ce corsaire ottoman qui semait la terreur en Méditerranée. En réalité, il est question de Gaspard Dot, tantôt corsaire, tantôt pirate, qui naviguait sur les eaux du Golfe du Lion, et qui est alors simplement surnommé Barberoussette. Ce n’est qu’en 1590, alors qu’il se voit confier le commandement d’un fortin à 10 kilomètres de Gruissan, que, pour plus de panache, il se fait appeler Barberousse, en référence, cette fois, au terrible corsaire ottoman. Par assimilation, mais certainement aussi pour donner plus de force aux légendes gruissanaises, la tour en ruine prendra le nom de Tour de Barberousse.
N'hésitez pas à grimper jusqu'à la Tour de Gruissan. De là-haut, la vue est exceptionnelle sur le village et la bande lagunaire de Narbonne.
Comments